dimanche 28 octobre 2012

"Inventaire après rupture", Daniel Handler

Min dépose une boîte devant la porte d'Ed. Dans cette boîte il y a une lettre et toute leur histoire, ou comme le dit aussi la couverture du livre, toute l'histoire de leur rupture. Beaucoup d'objets, des petits riens qui représentent pourtant quelque chose de précis aux yeux de Min : capsules de bière de leur première rencontre, tickets de cinéma de leur premier ciné, premiers mots d'amour, premier cadeau, etc. Des objets du quotidien qui sont autant de souvenirs... Dans sa lettre de rupture à Ed, Min rappelle les souvenirs qui sont rattachés à chaque objet, le plus souvent aigres-doux et qui contiennent aussi les prémices de leur rupture. C'est d'ailleurs ce qui rend la tonalité de ce livre si particulière. Min porte un regard sévère et amer sur leur histoire, à la fois plein de colère, de regrets et de confusions car on sent qu'elle n'est pas tout à fait débarrassée de ses sentiments pour Ed :  " (...) le problème avec les désirs du coeur, c'est que le coeur ne sait même pas ce qu'il désire, jusqu'à ce que l'occasion se présente. (...) tu étais là sans être annoncé, et à présent tu devenais mon seul désir, le cadeau absolu. Je n'avais rien cherché, je ne t'avais pas cherché, et à présent, là, dans la pénombre, tu étais tout ce que mon coeur voulait."


L'auteur retranscrit très bien ce déchirement. Par ailleurs, il parvient aussi à restituer une ambiance "teen movie" dans son roman sans tomber dans la facilité malgré quelques clichés! Ed et Min ne se ressemblent en rien et sont quand même attirés l'un par l'autre, on a déjà vu ça. Elle aime les grands classiques du cinéma américain, lui, est la star de basket du lycée et considère Min comme une "intello". Il l'admire car elle est différente, elle l'admire car il ne ressemble pas à ses amis. Mais à long terme, leurs différences deviennent trop prégnantes et la rupture est inévitable... En fait, ce qui apporte de la profondeur à ce récit c'est le personnage de Min. Elle est très cultivée et fait souvent référence à la littérature et au cinéma dans son inventaire. Ses remarques sonnent justes et le langage est plutôt travaillé : "Quelle conne j'étais de me prendre pour ce que je n'étais pas, quelle pauvre naze de me figurer que trois brins d'herbe font une jolie vue, que se faire embrasser rend embrassable, qu'aimer le cinéma fait de vous un cinéaste, qu'un carton de petites merdes est un trésor, qu'un garçon qui vous sourit est sérieux, qu'un moment doux est une vie plus belle."

Accompagné des illustrations à la gouache de Maria Kalman, ce roman plaira à tous les jeunes coeurs déçus qui pourront peut-être se retrouver dans l'histoire de Min et Ed!

Inventaire après rupture, Daniel Handler et Maria Kalman, Nathan, "Grand format", 2012